Recensione di F. Liszt al Concerto di Chopin del 26 aprile 1841.
("Revue et Gazette Musicale de Paris", 2 maggio 1841, pp. 245s.)

CONCERT DE CHOPIN.

Lundi dernier, à huit heures du soir, les salons de M. Pleyel étaient splendidement éclairés ; de nombreux équipages amenaient incessamment au bas d'un escalier couvert de tapis et parfumé de fleurs les femmes les plus élégantes, les jeunes gens les plus à la mode, les artistes les plus célèbres, les financiers les plus riches, les grands seigneurs les plus illustres, toute une élite de société, toute une aristocratie de naissance, de fortune, de talent et de beauté.
Un grand piano è queue était ouvert sur une estrade ; on se pressait autour ; on ambitionnait les places les plus voisines ; à l'avance on prêtait l'oreille, on se recueillait, on se disait qu'il ne fallait pas perdre un accord, une note, une intention, une pensée de celui qui allait venir s'asseoir là. Et l'on avait raison d'être ainsi avide, attentif, religieusement ému, car celui que l'on attendait, que l'on voulait voir, entendre, admirer, applaudir, ce n'était pas seulement un virtuose habile, un pianiste expert dans l'art de faire des notes ; ce n'était pas seulement un artiste de grand renom, c'était tout cela et plus que cela, c'était Chopin.
Venu en France il y a dix ans environ, Chopin, dans la foule des pianistes qui à cette époque surgissait de toutes parts, ne combattit point pour obtenir la première ni la seconde place. Il se fit très peu entendre en public ; la nature éminemment poétique de son talent ne l'y portait pas. Semblable à ces fleurs qui n'ouvrent qu'au soir leurs odorants calices, il lui fallait une atmosphère de / [p. 246] paix et de recueillement pour épancher librement les trésors de mélodie qui reposaient en lui. La musique c'était sa langue ; langue divine dans laquelle il exprimait tout un ordre de sentiments que le petit nombre seul pouvait comprendre. Ainsi qu'à cet autre grand poète, Mickiewicz, son compatriote et son ami, la muse de la patrie lui dictait ses chants, et les plaintes de la Pologne empruntaient à ses accents je ne sais quelle poésie mystérieuse qui, pour tous ceux qui l'ont véritablement sentie, ne saurait être comparée à rien. Si moins d'éclat s'est attaché à son nom, si une auréole moins lumineuse a ceint sa tête, ce n'est pas qu'il n'eût en lui peut-être la même énergie dé pensée, la même profondeur de sentiment que l'illustre auteur de Konrad Wallenrod et des Pèlerins ; mais ses moyens d'expression étaient trop bornés, son instrument trop imparfait ; il ne pouvait à l'aide d'un piano se révéler tout entier. De là, si nous ne nous trompons, une souffrance sourde et continue, une certaine répugnance à se communiquer au dehors, une mélancolie qui se dérobe sous des apparences de gaieté, toute une individualité enfin remarquable et attachante au plus haut degré.
Ainsi que nous l'avons dit, ce ne fut que rarement, à de très distants intervalles, que Chopin se fit entendre en public ; mais ce qui eût été pour tout autre une cause presque certaine d'oubli et d'obscurité, fut précisément ce qui lui assura une réputation supérieure aux caprices de la mode, et ce qui le mit à l'abri des rivalités, des jalousies et des injustices. Chopin, demeuré en dehors du mouvement excessif qui, depuis quelques années, pousse l'un sur l'autre, et l'un contre l'autre, les artistes exécutants de tous les points de l'univers, est resté constamment entouré d'adeptes fidèles, d'élèves enthousiastes, de chaleureux amis qui, tout en le garantissant des luttes fâcheuses et des froissements pénibles, n'ont cessé de répandre ses oeuvres , et avec elles l'admiration pour son génie et le respect pour son nom. Aussi, cette célébrité exquise, toute on haut lieu, excellemment aristocratique, est-elle restée pure de toute attaque. Un silence complet de la critique se fait déjà autour d'elle, comme si la postérité était venue; et dans l'auditoire brillant qui accourait auprès du poëte trop long-temps muet, il n'y avait pas une réticence, pas une restriction ; toutes les bouches n'avaient qu'une louange.
Nous n'entreprendrons pas ici une analyse détaillée des compositions de Chopin. Sans fausse recherche de l'originalité, il a été lui, aussi bien dans le style que dans la conception. A des pensées nouvelles il a su donner une forme nouvelle. Ce quelque chose de sauvage et d'abrupte qui tenait à sa patrie, a trouvé son expression dans des hardiesses de dissonance, dans des harmonies étranges, tandis que la délicatesse et la grâce qui tenaient à sa personne se révélaient en mille contours, en mille ornements d'une inimitable fantaisie.
Dans le concert de lundi, Chopin avait choisi de préférence celles de ses oeuvres qui s'éloignent davantage des formes classiques. Il n'a joué ni concerto, ni sonate, ni fantaisie, ni variations, mais des préludes, des études, des nocturnes et des mazurkes [sic !]. S'adressant à une société plutôt qu'à un public , il pouvait impunément se montrer ce qu'il est, poëte [sic !] élégiaque, profond, chaste et rêveur. Il n'avait besoin ni d'étonner ni de saisir ; il cherchait des sympathies délicates plutôt que de bruyants enthousiasmes. Disons bien vite que ces sympathies ne lui ont pas fait défaut. Dès les premiers accords il s'est établi entre lui et son auditoire une communication étroite. Deux études et une ballade ont été redemandées, et sans la crainte d'ajouter un surcroît de fatigue à la fatigue déjà grande qui se trahissait sur son visage pâli, on eût redemandé un à un tous les morceaux du programme.
Les Préludes de Chopin sont des compositions d'un ordre tout-à-fait à part. Ce ne sont pas seulement, ainsi que le titre pourrait le faire penser, des morceaux destinés à être joués en guise d'introduction à d'autres morceaux, ce sont des préludes poétiques, analogues à ceux d'un grand poëte contemporain, qui bercent l'âme en des songes dorés, et l'élèvent jusqu'aux régions idéales. Admirables par leur diversité, le travail et le savoir qui s'y trouvent ne sont appréciables qu'à un scrupuleux examen. Tout y semble de premier jet, d'élan, de soudaine venue. Ils ont la libre et grande allure qui caractérise les oeuvres du génie.
Que dire des mazurkes, ces petits chefs-d'oeuvres si capricieux et si achevés pourtant?

Un sonnet sans défaut vaut seul un long poëme,

a dit un homme qui faisait autorité au plus beau siècle des lettres françaises. Nous serions bien tentés d'appliquer aux mazurkes l'exagération même de cet axiome, et de dire que pour nous, du moins, beaucoup d'entr'eux valent de très longs opéras.
Après tous les bravos prodigués au roi de la fête, M. Ernst a su en obtenir de bien mérités. Il a joué dans un style large et grandiose, avec un sentiment passionné et une pureté digne des maîtres, une élégie qui a vivement impressionné l'auditoire.
Madame Damoreau, qui avait prêté à ce concert de fashion son charmant concours, a été, comme d'habitude, ravissante de perfection.
Encore un mot avant de terminer ces quelques lignes que le manque de temps nous force d'abréger.
La célébrité ou le succès qui couronnent le talent et le génie sont en partie le produit de circonstances heureuses. Les succès durables sont rarement injustes, à la vérité. Toutefois, comme l'équité est peut-être la qualité la plus rare de l'esprit humain, il en résulte que, pour certains artistes, le succès reste en-deçà, tandis que pour d'autres il va au-delà de leur valeur réelle. On a remarqué que dans les marées régulières il y avait toujours une dixième vague plus forte que les autres ; ainsi, dans le train du monde, il est des hommes qui sont portés par cette dixième vague de la fortune, et qui vont plus haut et plus loin que d'autres, leurs égaux ou même leurs supérieurs. Le génie de Chopin n'a point été aidé de ces circonstances particulières. Son succès, quoique très grand, est resté en-deçà de ce qu'il devait prétendre. Toutefois, nous le disons de conviction, Chopin n'a rien à envier à personne. La plus noble et la plus légitime satisfaction que puisse éprouver l'artiste n'est-elle pas de se sentir au-dessus de sa renommée , supérieur même à son succès, plus grand encore que sa gloire ?
F. LISZT.

CONCERTO DI CHOPIN.

Lunedì scorso, alle otto di sera, i saloni del Signor Pleyel erano splendidamente illuminati. Dalle molte carrozze continuavano a scendere ai piedi di uno scalone coperto di tappeti e profumato di fiori le dame più eleganti, la gioventù più alla moda, gli artisti più celebri, i finanzieri più ricchi, i nobili più illustri, tutto un mondo d'élite, tutta un'aristocrazia di nascita, di fortuna, di talento e di bellezza.

Un grande pianoforte a coda era aperto sopra un palco; ci si accalcava intorno, per occupare i posti più vicini; ci si preparava ad ascoltare, ci si raccoglieva, ci si diceva che non bisognava perdere un accordo, una nota, un'intenzione, un pensiero di colui che stava per venire a sedersi là. E la gente aveva ragione d'essere così avida, attenta, religiosamente commossa, perché colui che stava aspettando, che voleva ascoltare, ammirare ed applaudire, non era solo un abile virtuoso, un pianista esperto nell'arte di fare note; non si trattava solo di un artista di grande rinomanza, egli era tutto questo ed ancor più di questo: era Chopin.

Venuto in Francia circa dieci anni fa, Chopin, tra la folla di pianisti che in quel periodo spuntavano da tutte le parti, non lottò per ottenere il primo o il secondo posto; infatti, in pubblico si fece ascoltare molto poco, poiché per la natura eminentemente poetica del suo talento non vi era portato. Simile a quei fiori, i cui calici odoranti si aprono solo di sera, gli occorreva un'atmosfera di pace e di raccoglimento per effondere liberamente i tesori di melodia, che riposavano in lui. La musica era la sua lingua; lingua divina, nella quale egli esprimeva tutta una serie di sentimenti che solo pochi potevano comprendere. La musa della patria – come a quell'altro grande poeta, Mickiewicz, suo compatriotta ed amico – gli dettava i suoi canti, e il pianto della Polonia riceveva dai suoi accenti non so quale poesia misteriosa che per tutti quelli che l'hanno veramente sentita, non potrebbe essere paragonata a nulla. Se il suo nome ha fatto meno scalpore, se un'aureola meno luminosa ha cinto il suo capo, non è perché non vi fosse in lui, forse, la stessa profondità di sentimento dell'illustre autore di Konrad Wallenrod e dei Pellegrini; i suoi mezzi d'espressione erano troppo limitati, il suo strumento troppo imperfetto; con l'aiuto di un pianoforte non poteva rivelarsi nella sua completezza. Di qui, se non ci inganniamo, una sofferenza sorda e continua, una certa ripugnanza a rivelarsi al mondo esterno, una malinconia che si cela sotto apparenze di gaiezza, insomma una personalità unica, rimarchevole ed affascinante in sommo grado.

Come abbiamo detto, accadde solo raramente, ad intervalli molto distanti, che Chopin si facesse ascoltare in pubblico; ma proprio ciò che sarebbe stato per chiunque altro causa quasi certa d'oblio e d'oscurità, gli assicurò una reputazione superiore ai capricci della moda e lo ha messo al riparo dalle rivalità, dalle gelosie e dalle ingiustizie. Chopin, tenutosi al di fuori degli eccessi che da qualche anno spingono l'uno sull'altro, e l'uno contro l'altro, gli artisti-esecutori provenienti da tutte le parti del mondo, è rimasto costantemente attorniato da adepti fedeli, da allievi entusiasti, da calorosi amici che, proteggendolo da rivalità sgradevoli ed attriti penosi, non hanno smesso di diffondere le sue opere e, con esse, l'ammirazione per il suo genio e il rispetto per il suo nome. Così, questa celebrità raffinata, straordinariamente aristocratica, è rimasta pura da ogni attacco. Il totale silenzio della critica è calato su di essa, come se la posterità fosse venuta; e tra lo sfavillante pubblico ch'era accorso presso il poeta da troppo tempo muto, non vi era alcuna riserva né reticenza; tutte le bocche non erano che un coro di lodi.

Non ci impegneremo qui in un'analisi dettagliata delle composizioni di Chopin. Senza ricercare un'originalità posticcia, è stato lui, tanto nello stile quanto nella concezione. A nuovi pensieri egli ha saputo dare forma nuova. L'elemento selvaggio e violento che gli deriva dalla sua patria, ha trovato espressione in dissonanze ardite, in armonie insolite, mentre la delicatezza e la grazia che gli sono proprie, si sono manifestate in mille contorni, in mille ornamenti di un'inimitabile fantasia.

Nel concerto di lunedì Chopin aveva scelto di preferenza tra le sue opere quelle che più si discostano dalle forme classiche. Non ha suonato né un concerto, né una sonata, né una fantasia, né variazioni, ma preludi, studi, notturni e mazurche. Rivolgendosi ad una classe sociale più che a un pubblico, poteva impunemente mostrarsi ciò che è, un poeta elegiaco, profondo, casto e sognatore. Non aveva bisogno né di stupire né di sopraffare. Egli cercava simpatie delicate più che fragorosi entusiasmi. Diciamo subito che dette simpatie non gli sono mancate. Dai primi accordi tra lui e il suo uditorio si è stabilita un'intima comunicazione. Due studi e una ballata sono stati richiesti come bis, e, non fosse stato per il timore d'aggiungere fatica alla fatica già grande che il pallore del viso tradiva, sarebbero stati richiesti ad uno ad uno tutti i brani del programma.

I Preludi di Chopin sono composizioni di un genere del tutto a sé stante: non sono solamente, come il titolo potrebbe far pensare, pezzi destinati ad essere suonati a mo' d'introduzione ad altri pezzi; sono preludi poetici, analoghi a quelli di un grande poeta contemporaneo, che cullano l'anima in sogni dorati e la elevano fino alle regioni ideali. Ammirevoli per la loro diversità, il lavoro ed il sapere che contengono, non sono apprezzabili se non sottoposti ad uno scrupoloso esame. In essi tutto sembra di getto, di slancio, improvviso. Essi possiedono il tratto libero ed elegante che caratterizza le opere del genio.

E che dire delle mazurche, di questi piccoli capolavori, così capricciosi eppure così completi?

Un sonetto senza macchia val da solo un lungo poema,

ha detto un uomo ch'era un'autorità nel più bel secolo delle lettere francesi. Quanto a noi, saremmo ben tentati d'applicare alle mazurche l'esagerazione stessa di questo assioma, e di dire, per lo meno, che molte d'esse valgono opere molto lunghe.

Dopo tutti i bravo prodigati al re della festa, il Sig. Ernst ha saputo guadagnarsene di ben meritati. Egli ha suonato, in uno stile ampio e grandioso con sentimento appassionato e d'una purezza degna dei grandi maestri, un'elegia che ha profondamente impressionato l'uditorio.

Mme Damoreau, che s'era offerta di offrire il proprio gradito contributo a questo concerto del bel mondo, è stata, come di consueto, d'una perfezione ammirevole.

Ancora una parola prima di terminare queste poche righe che la mancanza di tempo ci costringe ad abbreviare.

La celebrità o il successo che coronano il talento e il genio, sono in parte il prodotto di circostanze felici. In verità, i successi durevoli sono raramente ingiusti. Tuttavia, dacché l'imparzialità è forse la qualità più rara dello spirito umano, ne risulta che per certi artisti il successo resta al di qua, mentre per altri va oltre il loro reale valore. Si è notato che nelle maree regolari vi era sempre una decima onda più forte delle altre; così, nello scorrere del mondo, vi sono uomini che sono spinti da questa decima onda della fortuna, e che vanno più in alto e più lontano di altri, loro pari o persino superiori. Il genio di Chopin non è stato affatto aiutato da queste circostanze particolari. Il suo successo, per quanto grande, è rimasto al di qua di quel che egli doveva pretendere. Tuttavia, e lo diciamo con convinzione, Chopin non ha niente da invidiare a nessuno. La più nobile e la più legittima sodisfazione che possa provare un artista non è forse quella di sentirsi al di sopra della propria fama, superiore persino al proprio successo, più grande ancora della propria gloria?

F. LISZT.

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